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Retour du Rwanda : un voyage qui bouleverse

C’était lors du dernier congé. Rappelez-vous, onze élèves partaient au Rwanda dans le cadre du projet Move with Africa, accompagnés de trois de leurs professeurs. Après avoir interviewé Félix et Gilles juste avant le départ, c’est au tour de Thaïs et Mia de passer sur le grill pour nous livrer leurs impressions, d’après voyage cette fois :

Q : Comment avez-vous vécu cette expérience de façon globale ?  Y a-t-il une émotion particulière qui ressort ? 

Thaïs : C’était la première fois qu’on partait en Afrique. Moi, je dirais que c’était humainement enrichissant, bouleversant. C’est un changement total de continent. Bouleversant, surtout parce que la vision des gens avec qui on a échangé là-bas est complètement différente. Ça m’a vraiment fait quelque chose en moi de voir à quel point, là-bas, les gens ont une autre vision de nous. 

Mia : Bouleversant, parce que ce voyage nous a donné une autre façon de voir le monde, de percevoir les choses. On s’est ouvert au point de vue d’autres personnes, et puis là-bas, c’est tout un autre mode de vie, avec un mode de pensée différent. On découvre aussi un quotidien qui n’est pas du tout le même que le nôtre. Puis, il y a ce truc où tous les regards sont sur nous, c’est assez déstabilisant. On ne fait rien de spécial, et on reçoit tellement en retour !

 Q : Et alors, au niveau vraiment du voyage y a-t-il une rencontre qui vous a marquée en particulier ?

Thais : Toutes les deux, je pense qu’on va citer le nom d’une personne, c’est Délice. C’était la fille d’un des organisateurs de l’association avec qui on a fait le séjour. C’était une chouette rencontre parce qu’on a appris plein de choses avec elle et on pouvait échanger de façon assez naturelle. On a rencontré d’autres jeunes à l’école de Mutuanda, mais avec elle le contact était encore différent, les échanges plus simples. On se contacte d’ailleurs encore par messages whatsapp !

Q  : S’il y avait maintenant un moment qui vous a spécialement marqué durant le séjour, lequel ce serait ?

Mia : C’est dur de choisir un moment !

Thais : Moi, j’en ai un, de moment. S’il fallait en choisir qu’un, ce serait celui passé au village près de Butaré, dans le sud, où on est resté pas mal de temps.  Six jours, il me semble. On a aidé à construire une maison, et c’était assez marquant de voir que tout le village se mobilisait pour la construire. Et puis de voir que ce sont surtout les femmes qui ont le rôle central. Si les femmes ne sont pas là, en fait, le village ne tourne pas ! On a tissé des liens avec les gens là-bas et plus spécialement avec une petite fille qui s’appelait Oussamaou. Elle n’arrêtait pas de danser… Et je n’arrêtais pas de danser avec elle ! On a beaucoup appris l’une de l’autre. Au moment de se dire au revoir, ça a été particulièrement émouvant. On a fondu en larmes toutes les deux !  Et ça, ça m’a profondément marquée à quel point l’amour, en fait, est infini et facile. En voyage, on vit les choses de façon plus intense. Les gens là-bas sont beaucoup plus dans l’humain. Et en fait, ça fait du bien.

Mia : Moi je retiendrais le match de foot contre les Lionnes, une équipe féminine locale. Les garçons et les filles ont participé. J’ai adoré. Parce qu’en fait, c’était trop cool. On s’est fait exploser !  On a joué sur un terrain en terre battue qui en fait, était plus une piscine qu’autre chose. Mais c’était très marrant, on était tous là sans se casser la tête. On a essayé de gagné mais… ça n’a pas marché. On a mis un but quand-même. Mais ce que j’ai le plus aimé, c’est après, on a eu une discussion avec les filles de l’équipe qui devaient avoir entre 16 et 20 ans. Quand je les ai vues arriver au début du match, je me suis dit qu’on allait pas pouvoir beaucoup discuter, elles avaient l’air très compétitives. Et en fait, pas du tout. On a beaucoup parlé… et  on a dansé avec elles aussi. On a eu une chouette soirée qui a suivi aussi, avec tous les élèves de l’école. On a vraiment pu parler avec tout le monde.  Et à ce moment-là, en rentrant de cette activité-là, où je me suis dit, en fait, “OK, là, je comprends le but de ce voyage. Là, maintenant, on est dans le concret.”

Q :  Justement. Ce serait quoi le but à retenir d’un tel voyage ?

Thais : L’échange de vision, je pense. L’échange de culture, l’apprentissage. J’ai parlé de ma propre culture et  c’est passionnant d’expliquer comment ça se passe en Europe. On reçoit des questions assez inhabituelles et ça fait prendre conscience du décalage entre ici et là-bas. 

Mia : Oui, il y a une énorme prise de conscience par rapport à ça,  du privilège que c’est de vivre du bon côté du monde, on va dire. Tout ce qu’on a, c’est un truc de dingue. Il faut s’en rendre compte. On ne le fait pas dans la vie de tous les jours. On a accès à tellement de choses si facilement, rien qu’au niveau des soins de santé et des médicaments par exemple… 

Q:  Vous pensez que toutes ces expériences auront un peu une influence sur la suite de votre parcours ?

Mia : Déjà, moi, je trouve que c’est important de faire entendre cette histoire à tous ceux qui veulent bien l’entendre. C’est un témoignage, c’est sûr.

Thais : Moi, ce qui m’a particulièrement changé, avant le voyage, je me préoccupais beaucoup des petites injustices que je vivais. Et quand je suis rentrée, après avoir vu c’est quoi la vraie injustice, ça m’a remis un peu les idées en place. Ca m’a quelque part apaisée de savoir que  je ne suis plus obligée de me battre pour les injustices que je vivais parce que je sais maintenant c’est quoi si j’ai une vraie injustice, ça m’a touché, même énervé de voir certaines choses. Ça m’a apporté plus que ce que j’avais ici. Et puis, c’est bouleversant de voir à quel point le bonheur est facile à avoir. Leurs problèmes sont bien pires que nos petits tracas, on ne va pas se mentir. Mais ils arrivent à regarder le positif tout le temps ! Ça nous ramène à beaucoup d’humilité. 

Mia : Moi, c’est vraiment de se satisfaire des choses simples, en fait. De ne pas aller chercher trop loin. C’est aussi un truc qui m’a frappée : là-bas, on ne faisait pas attention à notre apparence. On vivait comme on pouvait. On n’avait pas une goutte pour se laver parfois. Je me concentre beaucoup moins sur ce que les gens vont penser. Par exemple, pour les réseaux sociaux. Avant de partir, j’avais déjà pris une petite prise de conscience par rapport à ceux-ci et en revenant, c’est une réflexion qui s’est encore approfondie. Poster des photos, se demander ce que les gens vont penser, leurs commentaires… Être là-bas, ça fait réaliser que ça n’importe pas. Ce qui est important, c’est de savoir ce qu’il y a au fond de soi et de pouvoir le porter fièrement, le montrer aux autres sans pour autant se donner un rôle, ne pas se cacher derrière quelque chose.

Cette expérience vous donne envie de refaire d’autres voyages, en Afrique spécifiquement ? 

Thais : Ça me donne envie d’y retourner. De s’investir dans d’autres projets humanitaires. Ça m’a donné envie de faire des voyages mais ça m’a donné encore plus envie de faire ces actions dans le contact humain.

Mia : L’expérience peut être belle partout. Enfin, même, je veux dire, dans la rue à côté, on peut toujours découvrir. On devrait prendre aussi le temps d’apprendre à connaître ce qui nous entoure, s’ouvrir davantage aux autres. Près d’ici. Parce qu’on est fort centrés sur nous-mêmes. Enfin, je fais une généralité mais c’est quelque chose dont j’ai pris conscience aussi.

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